Photos réponse 61-2

Pipit spioncelle {Anthus spinoletta}

Vendredi 1er mars 2013, par Daniel Pareuil // Oiseaux mystère de Daniel

Bravo et merci aux courageux et courageuses, qui ont osé une réponse. Ne pas voir le bec de l’oiseau est un handicap, c’est certain ! Il fait partie de la silhouette et du « jizz ». Il faut alors se concentrer sur les autres parties du corps pour y détecter des indices et les confronter aux illustrations des guides ornithologiques.

La date de la photo, le milieu dans lequel évolue l’oiseau, doivent être pris en compte. En effet, bon nombre d’oiseaux ne présentent pas le même plumage en fonction des saisons.

La connaissance de l’espèce est un atout important pour l’identification sur photo.

Les herbes de la prairie inondée permettaient d’évaluer la taille de l’oiseau, en fait un petit passereau, (la taille d’un Moineau domestique Passer domesticus servant de référence).

Dans ce milieu, en hiver, beaucoup d’espèces peuvent évoluer, car le dégel libérait de la nourriture. Néanmoins, nous pouvions penser à des espèces de prairie comme les Alaudidés (Alouettes), les Motacillidés (Pipits, Bergeronnettes), certains Passéridés (Moineaux), les Fringillidés (Pinsons…) et les Embérizidés (Bruants).

Les Turdidés sont exclus de par la taille (exemple : Grives) ou bien parce qu’ils ne sont pas hivernants dans notre région (exemple : Traquets) ou parce que leur identification à l’oiseau mystère 61-1 serait évidente (exemple : Rougegorge familier Erithacus rubecula).

Sur la photo de l’oiseau mystère, nous pouvions relever quelques indices, dont certains ont été notés par J.J. Lacroix et M.L. Vieille :

Présence d’un sourcil clair, barres alaires claires et fines, stries sur les flancs, pattes noires ou sombres, « jizz » du Pipit maritime Anthus petrosus.

Feuilletons ensemble un guide ornithologique (complet, si possible), si vous le voulez bien, en suivant les familles citées précédemment.

Embérizidés (Bruants) : certaines espèces de cette famille pouvaient prêter à confusion, puisque le bec de l’oiseau mystère n’était pas visible :

Le Bruant des roseaux Emberiza schoeniclus.

Le Bruant zizi Emberiza circlus immature premier hiver.

Le Bruant jaune Emberiza citrinella immature premier hiver.

Mais pas de barres alaires claires, des flancs très striés, l’espace sous-mustacien* très marqué et les parotiques** typées, le dos fortement rayé.

Fringillidés (Pinsons…) : Ils sont pour la plupart très colorés, même en hiver, sauf peut-être la femelle Pinson des arbres Fringilla coelebs.

Mais cette dernière n’a pas les flancs striés.

Certains Passéridés (Moineaux) :

Le Moineau domestique Passer domesticus femelle.

Le Moineau espagnol Passer hispaniolensis femelle.

Le Moineau soulcie Petronia petronia.

Mais les parotiques, le trait sourcilier, le sourcil sont nettement différents de l’oiseau mystère 61-1, les flancs sont trop rayés ou pas du tout, et les pattes sont de couleur chair.

Les Alaudidés (Alouettes) :

Un certain nombre d’Alouettes ont la poitrine striée, mais les flancs le sont beaucoup moins. Chez l’oiseau mystère 61-1, il n’y a pas de huppe visible, pas de petite tache noire entourée de blanc sur le bord de l’aile (Alouette lulu). Tout cela élimine Alouettes et Cochevis.

Les Motacillidés (Pipits, Bergeronnettes) :

La longueur de la queue de l’oiseau mystère 61-1 élimine les Bergeronnettes qui ont toutes une longue queue.

Il nous reste les Pipits.

Regardons les cinq espèces nicheuses en France, en plumage internuptial :

Pipit rousseline Anthus campestris.

Ses flancs ne sont pas striés, son dos est uni, son sourcil clair est très large et il a un trait sourcilier. Les barres alaires sont visibles, mais l’une est soulignée de points noirs épais, les pattes sont couleur chair et l’ensemble de son plumage est clair.

Pipit Farlouse Anthus pratensis.

Ses flancs sont striés nettement sur un fond clair et le bord de l’aile repliée est souvent doré. Son dos est fortement rayé, des barres alaires sont visibles, il n’a pas de sourcil clair, son œil est entouré de blanc et ses pattes sont couleur chair.

Pipit des arbres Anthus trivialis.

Les stries sur les flancs sont fines, parfois inexistantes, le dos est rayé fortement, des barres alaires sont visibles, l’œil est entouré de blanc et il est traversé par un fin trait loral***, et ses pattes sont couleur chair.

Pipit maritime Anthus petrosus.

Les stries sur les flancs sont floues sur un fond sale (il vit dans les rochers et dans les ports où il y a du varech, et il se nourrit sur les laisses de mer. La couleur de son plumage est adaptée à son environnement.). Son dos est légèrement rayé, des barres alaires sont visibles, le sourcil clair n’est pas bien défini, ses pattes sont sombres.

Pipit spioncelle Anthus spinoletta.

Les stries sur les flancs sont floues sur un fond clair, son dos est légèrement rayé, des barres alaires sont visibles ainsi que le sourcil clair, généralement. Les pattes sont sombres.

Ce sont bien ces éléments que l’on retrouve chez l’oiseau mystère 61-1.

L’oiseau mystère 61-1 est un Pipit spioncelle Anthus spinoletta en plumage internuptial (hiver).

Bravo à MME Clamens, M.L. Vieille et J.J. Lacroix qui ont levé l’énigme.

Je n’ai pas parlé du bec, car il n’était pas visible. Mais il y a des différences : par exemple, celui du Pipit maritime est plus long que celui du Pipit spioncelle.

Ces deux espèces de Pipit se ressemblent. Dans un passé relativement proche, ces deux espèces étaient confondues (attention aux guides ornithologiques anciens).

Il y a une espèce nord-américaine de Pipit qui a été et peut être vue en France, c’est le Pipit farlousane Anthus rubescens. Cette espèce était également confondue avec les Pipits spioncelle et maritime.

Il a l’œil entouré de blanc du P. farlouse et son dos est encore moins rayé que celui du P. spioncelle.

Dans un groupe de Pipits farlouses en bord de mer où le Pipit maritime n’est pas loin, pour découvrir un Pipit farlousane, il faut une bonne pression d’observation !

Voyons la photo réponse.

Prairie Grande, près du plan d’eau du Tumulus (Gramat) (46), le 12/02/2013, Daniel Pareuil.

Avec le bec visible, c’est plus facile. La connaissance de l’espèce aide aussi.

Le Pipit spioncelle niche en montagne, dans les prairies d’altitude où il y a des rochers. Il utilise une fissure de rochers qu’il garnit d’herbes et de fibres.

Il hiverne en plaine, près des plans d’eau où il se nourrit. Il cherche sa nourriture à la limite de l’eau et de la terre, en tournant autour du plan d’eau. Cette limite de l’eau et de la terre rappelle un peu la laisse de mer que fréquente le Pipit maritime.

Il n’est donc pas étonnant de le trouver dans la Prairie Grande inondée, en hiver ou lors d’un passage migratoire.

Plage, lac d’Orient (Géraudot) (10), le 11/03/2006, Daniel Pareuil.

A cette époque de l’année, le lac est plein et crée des vasières qui sont appréciées par l’espèce.

Le plumage des parties supérieures du Pipit spioncelle passe du brun (internuptial) au gris (nuptial) et la lumière ne fait qu’amplifier les risques de confusion.

En-dessous du col de la Tombe du Père, Prat Bouc (Albepierres-Bredons) (15), le 15/05/2007, Daniel Pareuil.

Nous pouvons noter le passage du brun au gris. L’oiseau est sur le rocher, qui abrite peut-être son nid, et c’est son poste de chant. Ainsi, il délimite son territoire.

En dessous du col de la Tombe du Père, Prat Bouc (Albepierres-Bredons) (15), le 15/05/2007, Daniel Pareuil.

Même situation. A cette époque, l’espèce revêt le plumage nuptial. Les stries disparaissent, la poitrine devient rose pâle, les parties supérieures du plumage étant grises.

Réserve naturelle de Néouvielle (Vieille-Aure) (65), le 27/06/2004, Daniel Pareuil.

Une vraie métamorphose ! On devine le rose de la poitrine.

Réserve naturelle de Néouvielle (Vieille-Aure) (65), le 28/06/2004, Daniel Pareuil.

Dommage ! Le contre-jour modifie quelque peu les couleurs. Le gris semble brun et le rose est très pâlot.

Sa nourriture est à base d’invertébrés de graines.

C’est un nicheur peu commun en montagne : Pyrénées, Massif Central, Alpes, Jura, Vosges, Corse.

L’espèce est hivernante peu commune sur toute la France, sauf sur une partie de l’Aquitaine.

Dans le département du Lot, j’ai contacté assez régulièrement l’espèce en passage automnal ou printanier, principalement à la Prairie Grande et au plan d’eau du Tumulus (Gramat) (46).

Espèces observées à la Prairie Grande, le 12/02/2013, lors du dégel rapide :

- Bécassine des marais Gallinago gallinago.

- Buse variable Buteo buteo.

- Corneille noire Corvus corone.

- Etourneau sansonnet Sturnus vulgaris (environ 150).

- Bergeronnette grise Motacilla alba.

- Pipit farlouse Anthus pratensis.

- Pipit spioncelle Anthus spinoletta.

- Alouette des champs Alauda arvensis.

- Alouette lulu Lullula arborea.

- Bruant des roseaux Emberiza schoeniclus.

- Pinsons des arbres Fringilla coelebs.

- Grive Litorne Turdus pilaris.

- Grive mauvis Turdus iliacus.

Tous en nombre ! Un beau passage et quelques sédentaires, bien sûr.

A bientôt et avec plaisir !

* Espace sous-mustacien : espace de la tête de l’oiseau compris entre le trait malaire et la moustache. Cet espace part du bec vers le cou. Il est souvent confondu avec la moustache.

**Parotiques : espace de la tête de l’oiseau situé en dessous et en arrière de l’oeil et au niveau du cou.

*** Trait loral  : trait qui part du bec vers l’œil de l’oiseau.

Voir la topographie de l’oiseau, dans votre guide ornithologique, pour situer ces espaces et trait.

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1 Message

  • Photos réponse 61-2 11 mars 2013 18:25, par VIEILLE M-Louise

    Bonjour,
    je prends connaissance une peu tardivement de la réponse concernant l’oiseau mystère 61. J’apprécie beaucoup les belles photos et les explications trés détaillées . Merci à M. Pareuil.
    M-L Vieille

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