Photos réponses 96-2.

Chevalier stagnatile Tringa stagnatilis

Vendredi 8 décembre 2017, par Daniel Pareuil // Oiseaux mystère de Daniel

Bravo à Catherine Michels et Jean-Jacques Lacroix qui ont parfaitement identifié l’oiseau mystère 96-1 et pointé remarquablement les critères essentiels permettant de reconnaître à coup sûr l’oiseau sur le terrain.

Un limicole, haut sur pattes de couleur vert-jaune, ayant un bec droit très fin comme une aiguille, et à l’allure gracile…C’est signé !

Bonne analyse des deux photos datées !

Effectivement, la première photo, datée du 28/04/2006, montre l’oiseau mystère 96-1 en plumage nuptial ou presque, lors d’une halte migratoire prénuptiale en Camargue.

La seconde photo datée, du 09/08/2017, montre l’oiseau mystère 96-1 en plumage inter-nuptial au cours d’une halte migratoire post-nuptiale prolongée en Camargue.

L’estimation de la taille des pattes nous mettait sur le chemin des Chevaliers.

Sur la première photo de l’oiseau mystère, le tibia est assez grand et indique un chevalier de grande taille. Ainsi on élimine :

- le Chevalier sylvain Tringa glareola ayant des pattes plus courtes de couleur vert-jaune et une allure élégante.

- Les Phalaropes à bec étroit Phalaropus lobatus et de Wilson Phalaropus tricolor ayant des pattes plus courtes et des becs très fins.

Chez l’oiseau, le tibia est le segment visible au plus haut de la patte. En dessous du tibia, il y a le tarse puis les doigts, Au-dessus du tibia se trouve le fémur, très court et non visible. L’articulation qui relie fémur et tibia est équivalente à notre genou et celle qui relie le tibia au tarse est équivalente à notre cheville.

L’identification de l’oiseau mystère 96-1 à partir de la première photo était difficile, je pense, du fait que l’on ne voyait pas entièrement le bec.

En effet, fin avril début mai, l’oiseau mystère 96-1, dans cette position, peut être confondu avec le Chevalier aboyeur Tringa nebularia.

Ce dernier possède de grandes pattes de couleur vert-jaune et un plumage un peu similaire. Par contre, son bec est fort, et légèrement arqué vers le haut.

En cherchant davantage, nous nous rendrions compte que sa silhouette est plus massive, moins élégante. Le Chevalier aboyeur est le plus grand des Chevaliers pouvant être observés en Europe.

Sur la deuxième photo de l’oiseau mystère 96-1, le bec est visible, et le doute est levé.

Deux espèces nord-américaines, le Chevalier à pattes jaunes Tringa flavipes et le Chevalier criard Tringa melanoleuca sont éliminées par la couleur très jaune de leurs pattes.

A noter :

La silhouette du Chevalier à pattes jaunes rappelle celle du Chevalier sylvain.

La silhouette du Chevalier criard rappelle celle du Chevalier aboyeur.

Il ne reste plus qu’un seul concurrent.

L’oiseau mystère 96-1 est un Chevalier stagnatile Tringa stagnatilis.

Voyons la réponse en photo ;

- Première photo de l’oiseau mystère 96-1.

Marais de La Palunette de Fiélouse (Camargue) (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 28/04/2006, Daniel Pareuil.

Il s’agit d’un Chevalier stagnatile adulte en plumage nuptial ou presque.

Les parties supérieures du plumage sont grises et les couvertures alaires et scapulaires sont barrées d’un chevron noir, et bordées de blanc.

Les parties inférieures du plumage sont blanches et les flancs devraient s’agrémenter de chevrons noirs.

Le bec très fin est en grande partie noir. La silhouette est élancée et l’allure gracile.

Quelques fines barres noires sur l’extrémité de la queue.

Marais de La Palunette de Fiélouse (Camargue) (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 28/04/2006, Daniel Pareuil.

Ici, la couleur vert jaune des pattes ressort davantage. La hauteur de ses pattes en fait un chevalier de grande taille.

La date du 28/04/2006 correspond bien à une halte migratoire prénuptiale.

- Deuxième photo de l’oiseau mystère 96-1.

Observatoires 14 à 16, espace naturel, parc ornithologique du Pont de Gau (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 09/08/2017, Daniel Pareuil.

Adulte ou juvénile ?

Habituellement,

- le plumage juvénile s’observe de juillet à septembre.

- le plumage d’immature premier hiver s’observe d’octobre à avril.

- le plumage d’immature premier été s’observe de mai à juillet.

- le plumage inter-nuptial s’observe d’août/octobre à mars.

- le plumage nuptial s’observant d’avril à septembre.

(Source : Guide des limicoles D. Taylor.)

La photo ayant été prise le 09/08/2017, les plumages « juvénile » et « inter-nuptial » sont possibles.

Le plumage « juvénile » se caractérise par des couvertures alaires et scapulaires davantage brunes, et agrémentées de liserés chamois blanchâtres.

Le plumage « inter-nuptial » montre des parties supérieures grises relativement unies et des inférieures blanches. Le sourcil, la zone entourant le bec et la poitrine sont blancs et ressortent davantage que dans les autres plumages.

Il s’agit donc vraisemblablement d’un adulte en halte migratoire post-nuptiale.

La mue du plumage est en cours, en témoignent les restes de taches noires sur la poitrine.

Revenons à la période de la migration prénuptiale.

Marais de La Palunette de Fiélouse (Camargue) (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 02/05/2007, Daniel Pareuil.

Ces deux adultes de Chevalier stagnatile, en plumage nuptial ou presque, sont en halte migratoire. La teinte gris brunâtre des parties supérieures du plumage est accentuée vers le brun par la forte lumière présente en Camargue. A tel point que les pattes peuvent paraitre jaunes. Les guides mentionnent néanmoins que les pattes peuvent être naturellement jaunes. Le bec très fin et droit permet leur identification sans ambiguïté.

L’individu de profil, à droite, nous montre des couvertures alaires et des scapulaires ornées de chevrons noirs, et des tertiaires dentelées.

Chez le juvénile, les tertiaires sont dentelées plus finement. Les pointes claires (chamois chez le juvénile) sont plus étroites.

Marais de La Palunette de Fiélouse (Camargue) (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 02/05/2007, Daniel Pareuil.

Les ornements des couvertures alaires et des scapulaires, ainsi que les tertiaires dentelées sont, ici, plus visibles.

Le Chevalier stagnatile est un grand migrateur. Il niche au sol dans les marais d’eau douce de la taïga en Sibérie, et hiverne, en Afrique, au Moyen-Orient, en Inde et Australie. En hivernage et halte migratoire, il fréquente les zones humides d’eau douce et saumâtre.

La ponte serait de 4 œufs.

L’espèce est mono-typique, mais deux voies migratoires existent. L’une de ces voies passe par l’Europe de l’Est. Les individus observés en France proviennent probablement de cette voie.

Marais de La Palunette de Fiélouse (Camargue) (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 02/05/2007, Daniel Pareuil.

Le blanc de la queue et du croupion remonte beaucoup dans le dos, jusqu’à l’extrémité du manteau, comme chez le Chevalier aboyeur.

Mais, en vol, les pattes du Chevalier stagnatile dépassent davantage de la queue que chez le Chevalier aboyeur.

Ces éléments bien visibles, en vol, permettent de le distinguer des autres limicoles.

Observatoire 16, parc ornithologique du Teich (Le Teich) (33), le 11/08/2012, Daniel Pareuil.

En 2007 et avant, les observations de Chevaliers stagnatiles comptabilisaient des petits groupes de deux ou trois individus et souvent des individus isolés. Ces observations se faisaient principalement en Camargue.

Par la suite, des individus isolés ont été observés également sur les zones humides d’eau douce et saumâtre du littoral atlantique.

C’est le cas de ce Chevalier stagnatile faisant une halte migratoire au parc ornithologique du Teich en Gironde.

Ces dernières années, des groupes plus importants ont stationné lors de la halte migratoire post-nuptiale.

Par exemple, cette année en 2017, une douzaine d’individus ont été observés ensemble au parc ornithologique du Pont de Gau (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), pendant plus d’un mois.

Observatoires 14 à 16, espace naturel, parc ornithologique du Pont de Gau (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 09/08/2017, Daniel Pareuil.

La silhouette du Chevalier stagnatile est élégante et son allure est gracile. Elle rappelle celle de l’Echasse blanche Himantopus himantopus.

Ses déplacements en recherche de nourriture peuvent être rapides, c’est un oiseau très vif.

Généralement, il se déplace dans des eaux de faible profondeur et peut s’enfoncer jusqu’à la poitrine. Il peut également nager.

Observatoires 14 à 16, espace naturel, parc ornithologique du Pont de Gau (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 09/08/2017, Daniel Pareuil.

Bel ensemble !

Observatoires 14 à 16, espace naturel, parc ornithologique du Pont de Gau (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 09/08/2017, Daniel Pareuil.

Chevalier stagnatile en plumage inter-nuptial. Noter la taille des grandes couvertures alaires et scapulaires. Le liseré blanc qui les borde indique un plumage frais. Ce plumage neuf équipe l’oiseau avant l’hiver. Le liseré blanc disparaîtra progressivement, par abrasion due aux frottements dans l’air. C’est l’usure des plumes.

Seule la présence de quelques couvertures alaires de type « juvénile » permet d’identifier un immature de premier hiver d’un adulte en plumage inter-nuptial. Les immatures de premier été gardent le plumage inter-nuptial.

Il n’est donc pas facile, dès le début de l’automne, de donner un âge au Chevalier stagnatile.

Observatoires 14 à 16, espace naturel, parc ornithologique du Pont de Gau (Stes-Maries-de-la-Mer) (13), le 09/08/2017, Daniel Pareuil.

Le Chevalier stagnatile picore souvent les invertébrés à la surface de l’eau. Sa nourriture est composée d’invertébrés aquatiques, d’insectes et larves, de crustacés, de mollusques et parfois de petits poissons.

Cri au décollage : « tiuh » aigu ressemblant à celui du Chevalier aboyeur en moins aigu et surtout moins sonore.

Cri d’alarme entendu sur les sites de nidification et d’hivernage : « tchip » aigu rappelant le Chevalier sylvain.

Généralement, le Chevalier stagnatile est discret et peu loquace.

Statut : Sur la liste rouge mondiale : LC, c’est à dire : « préoccupation mineure ».

En France, le Chevalier stagnanile est un migrateur rare.

Actuellement, en Europe, l’espèce ne niche qu’en Ukraine et en Russie. Elle était donnée nicheuse en Roumanie en 2002.

A bientôt et avec plaisir.

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